LUCIE BAYENS

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lundi ou la vie sauvage

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Lundi ou la vie sauvage

 

Inuit des Landes

Peau de canard, laine, gros sel, 2010/2014.

 

Garonne
Filets d’orange tressés, 10x2.60 m, 2014.

Inuit des Landes

Peau de canard, laine, gros sel, 2010/2014.

Inuit des Landes

Peau de canard, laine, gros sel, 2010/2014.

Danse frétillante de l’abeille
Cheveux, tissu, 24x32 cm, 2014.
Étendard
Pin, 2x331 glands de chêne rouge d’Amérique, 2x1 m, 2014.
Eaux de Gascogne
Cheveux, toile batiste, 52x42 cm, 2014.
Borie de chien
Os, brandes, larmes de sirène, cuir de vache, 2014.
Borie de chien
Os, brandes, larmes de sirène, cuir de vache, 2014.
Borie de chien
Os, brandes, larmes de sirène, cuir de vache, 2014.
Borie de chien
Os, brandes, larmes de sirène, cuir de vache, 2014.
Logorrhées entériques
Intestin de porc, encre, bois, 2010-14.
Vitrine I: Dune boue de Garonne, Liste#2 os, Estuaire Royal Paris dessin sur canevas, Gulf Stream cheveux toile batiste, Liste#3 os, Chaussons mousse. Vitrine II : Liste des courses, Dune sable, Medailles galalithe, bobine cheveux. VitrineIII : 3 flotteurs, 1 branche & cheveux, fragments de galalithe, List#4 os, itinéraire chélidoine, Fading cellule cheveux. Lundi ou la vie sauvage, conte, 2014. Charnière, bouts de bois pyrogravés, dimensions variables, 2013/14. Vitrines.
Pinus air line #2 #3 #4, BIOGM,
Papier millimétré, ailette de pignon de pin/ boue de Garonne/ pétale de pomme de pin, 2013-14.
Ragondin
Pétales de pomme de pin, tissu, mousse, 2014.

Ragondin

Pétales de pomme de pin, tissu, mousse, 2014.

Je vis et travaille en Gironde, où j’ai grandi. Un pied en ville, au bord de la Garonne et l’autre dans la forêt du littoral, face à la mer, sous les pins maritimes. Devant : l’océan, au-delà : l’Amérique.
Cernée d’eau, sur les deux territoires, j’ai appris en observant la nature. Les lamproies pendaient et l’alose grillait. Marcher, glaner, créer. Lundi ou la vie sauvage fait écho à Robinson Crusoé ; 35 ans de « captivité » parfois heureuse et teinté de mal confort d’un naufragé qui apprend en tâtonnant toutes sortes de techniques pour améliorer sa condition. Scruter l’horizon, faire avec les moyens du bord, chercher une symbiose. Lundi, premier jour de la semaine donne un rythme de travail et à la dérive.  Robinson trouve son compagnon le dernier jour de la semaine, avant le weekend. Entre la fin et le début, la frontière est ténue ou comment apparaît la vie. « Les derniers seront les premiers » dit l’apôtre Matthieu.
Les océans et les fleuves sont des failles remplies d’eau. La vie n’est-elle pas une faille remplie majoritairement d’eau ? Faut-il vivre en naufragé solitaire ou naviguer à terre, porté par les cultures et l’autre ? Les deux, mon capitaine. Créer des îlots de pensées sous des néons de fortune, c’est cela Lundi ou la vie sauvage. Marcher sur la plage, chercher des trésors dans les abjects d’une civilisation. Marcher sur les quais de Bordeaux à marée basse, regarder le curieux qui regarde le ragondin qui regarde le pigeon qui s’envole. Marcher dans les parcs, ramasser des glands et des pommes de pin. Dialoguer avec la matière organique, procéder à une combinaison. Aller à la rencontre du boucher, chercher un langage commun, prendre du retard. Marcher vers La Laiterie, rencontrer Pascal Daudon, boire du bon café et lui emprunter des livres. A La Laiterie, on entend le coucou se battre avec la couleur. Faire émerger le bout d’un continent de sel. Percher les glands, faire virevolter L’Echelle Sociale pour, finalement la jeter à la Garonne. Tendre la Trouée. Fabriquer une Borie de chien en os car les produits laitiers sont nos amis pour la vie. La queue du Ragondin  pend, tandis qu’il rêve d’ailleurs en regardant passer les ailes de l’A380 sous le Pont de Pierre. Que ce soit le fading de la cellule vivante, la danse de l’abeille ou celle du Gulf Stream, je brode le pulsionnel d’une main imputrescible. Lundi marche avec moi.

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Au bout du continent, des rives avec Lucie Bayens

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« Lundi ou la vie sauvage » (DR)


Lucie Bayens expose « Lundi ou la vie sauvage » du 9 au 28 mai à La Laiterie à Bordeaux : une œuvre sur des préoccupations sociétales, écologiques et scientifiques.
Au commencement de l’exposition, il y a la rencontre avec l’animal comme pour nous proposer d’adopter un autre point de vue sur l’humain que celui de l’homme. Lucie Bayens en tentant d’associer le sauvage au domestique construit une matière poétique sous la forme d’une mythologie vernaculaire où l’homo faber, l’homme qui fabrique, et l’homo ludens, l’homme qui joue, retrouvent pleinement leurs droits.
Au bout du continent, pas à pas sur la rive
L’action se situe « au bout du continent » : Lucie Bayens vit et travaille à Bordeaux, ville de transit par son histoire. Elle construit sa pensée au cours de ses marches entre les rives de la Garonne en crue, le bord de l’océan, dans les forêts landaises… « Et d’ailleurs la signification propre d’une œuvre n’est-elle pas celle qu’elle est susceptible de prendre par rapport à ce qui l’entoure ? » (André Breton, « Les Pas perdus »).
Le propos n’est donc pas seulement construit sur une matière poétique mais il s’appuie sur des préoccupations sociétales, écologiques et scientifiques. Aucune des pièces réalisées ne vient comme la réponse à un questionnement. Chacune d’elles conduit le regardeur à explorer une problématique complexe.
L’ici et le maintenant
La pratique de Lucie Bayens est protéiforme, tentaculaire avec pour fil rouge un univers rempli de formes mutantes, de territoires, de fleuves. On trouve des dessins brodés avec des cheveux, des bois pyrogravés, des peaux animales cousues… Le travail s’étend par lui-même et mélange les approches, multiplie les regards. Les pratiques réunies amplifient la force de l’imaginaire.
L’enjeu est d’une étonnante continuité dans le détournement total des techniques savantes, des usages ancestraux au profit d’une réflexion sur l’ici et le maintenant tout en poursuivant une exploration où le réel et la fiction échangent des données et nous projette finalement face à ce que l’on témoigne de notre époque. Et la cohérence vient de là.
Ralentir le temps…
Les œuvres ont une apparente légèreté, simplicité qui s’oppose à leur process empreint d’une expérience cognitive de la vie courante, de marches et de réflexions sur les rebuts de notre société.
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Lucie Bayens, « Charnières » (DR)
Parcourir les berges, les forêts, la ville
L’intention artistique chez Lucie Bayens nait de « l’expérience du trajet parcouru » chère à l’artiste-marcheur Hamish Fulton, et de l’observation aiguisée des formes de vie, de lieux. La marche implique de considérer dans une hyper-disponibilité à l’événement, à l’espace de prospection. Ensuite vient la récolte en vue la réappropriation d’éléments, la brande récoltée en forêt, les bois flottés, les rebus, dans le champ sublimé de la rematérialisation à l’œuvre. La nature est tout, sauf morte, rien ne se perd.
La collection d’échantillons : un lexique empirique
Le processus dans l’œuvre de Lucie Bayens est construit par des collectes d’éléments très divers dans les espaces dits « naturels » ou au cœur de la ville notamment sur les rives de la Garonne. Ils sont répertoriés sous forme d’échantillons « vitrine », une grammaire de réflexion qui cartographie ses déplacements. On y trouve un échantillon de la collection des « larmes de sirènes », ces granulés plastiques d’origine industrielle éparpillés sur les plages avec les macro-déchets dérivants, traces d’une société consumériste. Il s’agit de récolter des données pour nous soumettre des raccourcis audacieux et féconds.
Chaque collection (bois, os, peaux…) se complète d’années en années sans pour autant être inachevée : elles se chargent de sens au fur et à mesure des ajouts. Chaque geste précis se rajoute au précédent, identique et pourtant différent dans la réappropriation de certains savoir-faire traditionnels. Il en résulte des œuvres habitées par le temps long autarcique du process ainsi que par le détournement de ce que serait le geste répétitif d’une chaine d’usinage d’objets normés. La fonction se déplace.
Règne animal, approche magique ou scientifique ?
Lucie Bayens garde en mémoire de l’enfance les images de l’abattoir, les lamproies suspendues, le sang, les os, un théâtre qui raconte le monde, le passage de la vie à la mort.
Le castor des marais
Mi-animal, mi-végétal, ce « ragondin » mutant, cousu d’écailles de pommes de pins provenant des Landes issues d’une culture artefact intensive. Ce travail méticuleux inspiré de technique du sequin en confection détourne pour mieux mettre en évidence les paradoxes de nos comportements dans notre retour à la nature, création d’éco-quartiers en bord de marais… Les ragondins de Bordeaux ont colonisé depuis des décennies la plupart des plans d’eaux douce de la Gironde et sont considérés comme un rongeur nuisible.
La cabane à voute
« Borie de chien » est une sorte de niche faite d’os, de carapace qui renvoie aux besoins vitaux : l’abri et la nourriture. Les ossements utilisés comme matériau de production artistique sont support de réflexion sur l’anthropologie du quotidien. Les assemblages d’ossements rappellent des techniques utilisées pour les ornements des peuples premiers. Ici, la collection en os renvoie aux détournements que l’homme impose à une évolution naturelle puisqu’il s’agit d’animaux d’élevage.
Par métonymie on passe d’un objet à un être : l’abri et le sans-abri dans une société qui ne protège plus, où l’humain est son propre prédateur – et où « il nous faut laisser le moins de plumes possible ». On pense au « Bread bed » de Jana Sterbak. Le mythe du Robinson naufragé se prolonge à travers le sens de la protection sociale devenue précaire.
Sur les étendues de sel marin
Des jouets et des protections d’extrémités, chaussures, moufles, balles, ballons forment une installation « Inuit des Landes » réalisée à partir des ressources naturelles disponibles, locales : la peau de canard épaisse semble parfaite pour s’acclimater à un biotope hostile ou froid, réminiscence du temps de neige évoqué par la présence du sel marin, blanc immaculé.
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Lucie Bayens, « Inuit des Landes », collection empirique depuis 2009 (DR)
Le sel devient un support fictionnel, une île dans l’espace d’exposition sans pour autant être un non-lieu. Le sel est aussi le moyen de conservation de cette collection.
Retour du règne animal ?
Pas nécessairement : l’objet prend une dimension « magique » quand son sens dépasse sa finalité formelle pour prendre sens dans une valeur d’usage. Lucie Bayens compose des objets porteurs d’une force visuelle, un bestiaire magique, des outils polémiques aux multiples facettes. Chacune de ses pièces propose diverses lectures : celle du sorcier, du mystique, ou encore celle du scientifique, du généticien, du prédateur ou de la proie.
On trouve dans la collection d’échantillons « vitrines », une liste de courses gravées sur un os, témoin de notre société consumériste futile. La liste est ici fixée de manière temporelle durable, la question posée semble de réveiller les consciences sur les traces que nous souhaitons transmettre de notre civilisation. Lucie Bayens joue de la notion d’authenticité en incorporant des matières plastiques pour leurs propriétés, leurs colorations, leur origine, et leur usage local et opère un décalage dans la finalité de leurs fonctions qui dépasse l’approche ethnographique.
La couture comme une greffe
L’artiste recycle essentiellement des rebuts : filets d’oranges, ossements et peaux d’animaux, glands de chênes…
L’action de tisser, de coudre, est répétée inlassablement et raisonne selon la logique propre des matériaux qu’elle rencontre. On y retrouve toujours une simplicité dans le geste choisi (tracer une ligne, coudre, assembler, compacter).
Lucie Bayens tisse du sens avec des fils de pêche, des cheveux. La broderie minimale de Lucie Bayens dessine par le cheveu imputrescible parfois de la couleur du support. Le cheveu poursuit sa ligne et ajoute des seuils de transparences à des représentations telles que la « Danse frétillante de l’abeille » ou la « division cellulaire » ou les contours du « Gulf stream » – comme si par le choix pour la représentation de ces motifs, d’une pratique délicate, Lucie Bayens nous questionnait, non sans ironie, sur l’apparition de la vie et les usages appliqués de la science.
Au fil d’une écriture
Les dessins et la broderie se lisent comme une écriture insistante par son caractère graphique, tandis que les mots tamponnés sur les intestins de porc, font « image » à la manière d’une signalétique.
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Lucie Bayens, « Messages », intestin de porc tamponné et fixé sur des pièces de bois, dimensions variables, 2010 (DR)
Le message est ici fixé à l’heure où l’information est engloutie dans un flux numérique. La dimension dialectique de ses modèles poétiques et le rapport aux matériaux naturels ou transformés forment tandem indissociable et évocateur. « Charnières », l’ornementation pyrogravée sur des bois flottés, représente des armes à feu. L’assemblage des bois comme celui d’un feu de bois vient lui donner une autre densité aux représentations gravées.
L’espace d’exposition, un territoire en expansion
Lucie Bayens est un artiste du faire, du sensible. « Que faut-il alors entendre par œuvre ? Œuvre qui vient du latin opera, travail, soin, a hérité de plus en plus des sens d’opus : travail, mais aussi résultat du travail, chose fabriquée » (Fabienne Brugère, professeur de philosophie à l’Université de Bordeaux 3, « La disparition de l’œuvre »). Dans la démarche de Lucie Bayens, le concept naît des pérégrinations en Aquitaine et de la forme : c’est l’agencement des matériaux dans le temps qui donnent naissance à la pièce qui fait œuvre.
Une cartographie autour de la Garonne
Lucie Bayens au delà de créer des pièces, chorégraphie l’exposition « mise en œuvre » pour nous « déboussoler ». Elle « magnétise » l’espace avec les 4 éléments comme des points cardinaux, l’air, le chaud et le froid, et principalement l’eau. Le cinquième s’ajoutera avec la lecture du regardeur dans la circulation de l’espace guidé par le fil rouge. La « Garonne », une longue tresse rouge de 15 mètres faite d’innombrables filets d’oranges comme une carte du ciel, une carte « vitale » qui contient l’histoire du commerce fluvial et draine un mur entier de l’exposition.
Lundi ou la semaine en marche
Via la métamorphose de ces objets ou rebus préexistants, Lucie Bayens déplace le regard du spectateur pour l’amener dans le champ de projection de l’imaginaire « Lundi ou la vie sauvage » dans un monde contemporain ou le lundi, 1er jour de la semaine d’un travail qui consiste à repenser le monde. Elle semble portée par une distance de quelques siècles à venir, à la manière d’un anthropologue qui se pencherait sur notre mode de vie actuel pour le saisir avec ses contradictions.
Des influences transversales
Les œuvres singulières de Lucie Bayens, chercheuse téméraire aux influences transhistoriques nous renvoient autant à l’arte povera, et notamment Penone, Wim Delvoye, qu’à l’utilisation de techniques ornementales issues des arts premiers. Le lien à histoire de l’art est présent mais au même titre que la science ou l’anthropologie ou la littérature. Lévi-Strauss a défini le problème de l’humanisme dans le fait qu’à force de séparer l’homme de la nature sauvage – maîtrise du feu, puis du végétal par l’agriculture, l’animal avec l’élevage –, on finit par exclure et séparer… Tous les gestes de Lucie Bayens tendent à lier, assembler, à provoquer l’altérité, à réconcilier l’homme comme faisant partie d’un tout.
Parcours et projets
Née en 1979 à Bordeaux, Lucie Bayens est diplômée de l’Ecole des Beaux-arts de Bordeaux, elle développe parallèlement à son travail d’artiste des actions de médiation culturelle, des projets d’éditions. Après des réalisations avec d’autres artistes en partenariat avec le CNRS et Cap Sciences, Lucie Bayens cherche à poursuivre sa pratique artistique sur les berges de Garonne, avec des chercheurs en biologie marine et en ethnobotanique.
INFOS
Du 9 mai au 28 mai – vernissage le 7 mai à 19 h
La laiterie – 84, rue Amédée-Saint-Germain à Bordeaux
Du mardi au samedi de 17 h à 20 h sur rendez-vous
Contact : luciebayens@gmail.com

 

 

 

 

 

 

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